Pour aller plus loin…


Les mots du français se distribuent en « mots lexicaux », comme nuage, joie, peur courir, dormir, jaune vertical…qui sont en très grand nombre et en constante augmentation et en « mots grammaticaux », comme un, la, un, de, sur, …qui sont en inventaire restreint et dont le nombre évolue peu.


Les mots lexicaux

Les mots lexicaux varient dans leur forme au fil du temps et constituent une liste ouverte ; ainsi au fil des années, les dictionnaires s’enrichissent de mots nouveaux. Les mots lexicaux se classent dans des ensembles en fonction de leurs compatibilités d’associations : ces catégories constituent leurs nature.

  • Les noms sont le plus souvent précédés d’un article (un, le), d’un adjectif possessif, démonstratif (son, cette…) et varient en nombre ;
  • Les verbes sont accompagnés de marques de temps et varient selon la personne (ils chantent, tu chantes, tu chanteras..) ;
  • Les adjectifs qualificatifs varient en genre et nombre selon le nom auquel ils se rapportent.
  • Les adverbes sont invariables.

Mais chaque ensemble est aussi défini par son appartenance à de grandes catégories de sens. Les élèves remarqueront (et les jeunes élèves les premiers) que les noms représentent des objets inanimés, des êtres animés et aussi des notions abstraites. De même, que les adjectifs qualificatifs renvoient à une qualité (ou… un défaut) ou à une propriété. Et que les verbes évoquent en majorité des actions ou du moins décrivent des processus.

Ils comprendront que la nature d’un mot est donc doublement définie : par ses compatibilités grammaticales et par un rapport particulier aux éléments du monde.

Même si ce rapport à la réalité peut parfois paraître approximatif et sans doute moins constant que les relations formelles, il n’en constitue pas moins un repère utile et naturel pour un élève notamment au cycle 2. C’est donc à partir des critères formels et des appartenances sémantiques qu’il reconnaîtra les catégories de mots (leur nature). Ainsi, un élève saura une fois pour toutes que le pluriel des verbes se fait en NT alors que celui des noms se marque par S et parfois X. Mais faudrait-il pour autant empêcher un élève de CE1 de remarquer qu’un verbe exprime le plus souvent une action sous prétexte qu’il aura plus tard à découvrir qu’il existe des verbes d’état ?

L’apprentissage de la grammaire doit donc accepter la notion essentielle de conclusions provisoires : constats de « bon sens » susceptibles d’être modifiés, complétés, précisés sans nécessairement être contredits, tout en imposant le strict respect des règles formelles qui structurent les énoncés.

On peut changer la nature d’un mot

La suffixation permet en français, de changer la nature des mots. Tout en restant dans le même univers de sens, on fabriquera donc des verbes, des noms, des adjectifs ou des adverbes.

Ainsi,

  • d’un verbe on fait un nom : opérer-opération ; repérer-repérage, blesser-blessure, baigner-baignade, vieillir-vieillissement, agir-action, allier-alliance, admirer-admirateur, bouillir-bouilloire,…
  • d’un nom on fait un adjectif : délicat-délicatesse, Italie-italien, veine-veinard, Beau-beauté, fou-folie, fourbe-fourberie, sauvage-sauvageon, roux-rouquin,…
  • D’un nom on fait un verbe : bosse bosseler, mouche-moucheter, goudron-goudronner,…

Les mots grammaticaux

Ils constituent, eux, une liste fermée, c'est-à-dire qu’ils sont en plus petit nombre et n’augmenteront pas en fonction des besoins de la communication. Ils se distribuent en deux catégories qu’il faut soigneusement distinguer. D’une part les déterminants, articles, adjectifs possessifs, démonstratifs … qui accompagnent les noms et les déterminent. D’autre part les indicateurs de fonction : prépositions comme « à », « de », « pour », « dans »… qui servent à relier deux mots entre eux et à indiquer le contenu de la relation qu’ils entretiennent. Examinons leurs fonctionnements respectifs:

Un déterminant comme « cette » dans la phrase « Tu prends cette route » n’a d’autre rôle que de déterminer « route » en apportant une information particulière : soit les deux interlocuteurs sont à une intersection et l’un montre à l’autre la route à suivre (celle-là et pas l’autre) ; soit ils ont déjà mentionné la route en question dans leur conversation et l’un d’eux rappelle, dans l’intimité de son salon, de quelle route il s’agit. En tout état de cause le déterminant « cette » est directement tourné vers le nom « route » ; il ne le relie à rien. Il a une action centripète.

Au contraire, un connecteur comme « à » dans la phrase « il a offert un bouquet à la maitresse » sert à rattacher le nom « maîtresse » au verbe « offrir » en indiquant que « maîtresse » est la destinatrice de l’offre. Ce connecteur rattache un nom ou un groupe à la phrase ; il a une action centrifuge. Une conjonction comme « afin que » qui relie une proposition à une autre en établissant une relation de but, est aussi un connecteur ; il a lui aussi une action centrifuge. De même, les positions respectives de Pierre et de Paul dans « Pierre bat Paul » sont des indicateurs de fonction et distribuent les rôles respectifs de chacun des deux personnages.

Si un mot a une nature constante, il peut avoir des fonctions diverses. Le locuteur (ou le scripteur) peut lui imposer l’une ou l’autre fonction au gré de la mise en scène qu’il propose (ou impose) à son auditeur ou à son lecteur.

Ainsi le nom « marchand » peut être sujet-agent si je le place devant le verbe ; il peut devenir COD-patient si je le positionne après ; il peut aussi être COI-destinataire si je le fais accompagner de la proposition « à » ou « pour » ; on le trouvera même comme un lieu si on le fait précéder de la préposition « chez ». Les choix des fonctions assignées aux mots d’une phrase imposent un scénario au film que réalise l’interlocuteur.

La classe des noms est celle qui ouvre à un nombre très important de fonctions ; et on le comprend bien : évoquant des objets, des êtres animés, c’est autant d’acteurs qu’elle propose aux rôles les plus divers.

Un adjectif qualificatif n’est pas aussi polyfonctionnel qu’un nom. Lui devra se contenter d’être soit épithète (la maison bleue) ou attribut (la maison est bleue).

L’adverbe lui est monofonctionnel : « ici » sera toujours complément de lieu ; « demain »complément de temps et « doucement » indiquera toujours la manière dont se déroule une action.

Examinons les différentes fonctions du français.


  • Le sujet : Une fonction nécessaire

Le mot ou le groupe de mots qui occupe la fonction sujet informe celui à qui l’on s’adresse de ce dont on va lui parler. Le groupe verbal qui le suit, indique, lui, ce que l’on dit du sujet. Ainsi, dans la phrase« les nuages blancs volent dans le ciel », le groupe sujet« les nuages blancs » indique ce dont je parle et le groupe verbal « volent dans le ciel » marque ce que j’en dis.

Le sujet en français est obligatoire. Une phrase ne peut être complète que si elle possède un sujet. Se passer du sujet reviendrait à dire que l’on peut tenir un propos sur… rien. Même dans une phrase comme « Joli !» qui semble fonctionner avec un seul mot, le thème à propos duquel l’exclamation « joli ! » est proférée est en fait implicite ; connu de celui qui parle et de celui à qui il s’adresse. Il est donc superflu de le spécifier, mais il est présent dans l’esprit de l’un comme de l’autre.

Lorsque le sujet se rapporte à un verbe d’action, il indique l’agent ou le responsable d’une action, ainsi « l’homme marchait ». Avec un verbe d’état comme « être » il se voit attribuée une qualité. Ainsi dans « Pierre est grand », une caractéristique, « la grandeur » est attribuée au sujet « Pierre ».

Le sujet se place « à gauche » ou « avant » le verbe ; c’est ce qui indique sa fonction en le distinguant du complément d’objet direct (COD) qui, lui, est après le verbe ou à sa droite. C’est ainsi que l’on peut affirmer que« le chou a mangé la chèvre ».

Lorsque le verbe n’a pas de COD, on peut placer le sujet après le verbe sans pour autant créer une ambigüité. Ainsi « Dans le ciel d’azur, volent les nuages.. ». Toutes les langues du monde n’utilisent pas la position pour distinguer le sujet et le COD. Ainsi le latin marque-t-il le sujet par une désinence casuelle (le nominatif) et l’objet par une autre désinence casuelle (l’accusatif) : « dominum servus castigat » ou « servus dominu m castigat » signifiera en dépit de l’ordre des mots « l’esclave châtie le maître ». Peuvent être le plus fréquemment en fonction sujet : les noms, les pronoms, parfois les infinitifs (« Mentir est honteux ») ou parfois une proposition (« Qu’il arrive en retard serait fâcheux »).

L’utilisation de la voix passive permet de ne pas désigner (ou plutôt de dissimuler) le responsable d’une action. Le sujet du verbe à la voix passive ne dévoile pas l’agent responsable de l’action mais celui qui la subit. Le complément d’agent du verbe passif qui pourrait désigner qui a fait quoi n’est pas obligatoire. On ne sera pas étonné d’apprendre que le discours politique comporte deux fois plus de passifs que les autres discours.


  • L’attribut

Après les verbes d’état : être, paraître, demeurer, rester, sembler, avoir l’air, passer pour, naître, vivre, tomber, la fonction d’attribut du sujet est le plus souvent occupée par un adjectif qualificatif. Comme son nom l’indique, il attribue au sujet une qualité ou indique son état. Ainsi « Pierre était sale et triste ».

Un nom ou un pronom peut être aussi attribut du sujet : ainsi, « Pierre est maçon ! » ou « Non, il ne l’est pas ! »

Un adjectif peut occuper la fonction d’attribut du complément d’objet direct avec des verbes transitifs comme « appeler », « croire », « déclarer », « estimer », « juger », « nommer », « laisser », « rendre »… il faut bien saisir la différence entre attribut du COD et épithète. Analysons l’exemple suivant :

« Je vois la maison blanche » peut répondre à deux questions différentes : « voyez- vous la maison blanche, là sur la droite ? » ou bien « cette maison là sur la droite, la voyez-vous blanche ou plutôt grise ? ». La réponse à la première question fera de « blanche » un épithète qui détermine maison ; la réponse à la deuxième question confère à l’adjectif la fonction d’attribut de du COD « maison » auquel il est relié par le verbe « voir ».

Un nom peut être aussi attribut du COD : « le roi le nomma chevalier » ou « il m’a appelé bouffon ».

Parfois certains élèves ont quelque difficulté à distinguer l’adjectif attribut du sujet du COD. C’est parce qu’il pose à l’attribut la question qu’il devrait réserver au COD. « Paul mange quoi ? Une pomme. Paul est quoi ? Médecin ou grand. La meilleure façon de distinguer attribut et COD est de passer par le dessin. Si l’on représente la première phrase, on distinguera clairement « Paul » et « la pomme », acteurs distincts jouant chacun un rôle spécifique. Si l’on dessine (ou mime) la seconde phrase, on ne distingue qu’un seul, personnage (Paul) dans un accoutrement ou une position particulière.


  • Les compléments du verbe

- Le verbe et ses valences

Ne l’oublions pas ! C’est largement le sens du verbe qui détermine les fonctions qu’il peut accepter ou exiger. En d’autres termes ses valences fonctionnelles (c'est-à-dire les différentes fonctions qu’un verbe peut générer) dépendent de la nature du processus que le verbe évoque. Prenons quelques exemples :

Le verbe « courir » renvoie à une action qui dans la plupart des expériences ne porte sur aucun objet ou aucun être. En règle générale, à part le guilledou ou les filles on ne court… personne. On dira de ces verbes qu’ils sont intransitifs ou monovalents.

Le verbe « rencontrer » invite, lui, à une représentation qui implique deux acteurs dont l’un est plus responsable de la rencontre que l’autre. Il est tout à fait improbable que le verbe « rencontrer » n’ait pas un complément d’objet direct. C’est aussi le cas de « fréquenter », « aimer »… Il s’agit de verbes dits transitifs ou bivalents.

Le verbe « manger » renvoie à une action qui permet certes de dire ce que l’on mange du pain ou du couscous, mais autorise aussi à ne pas le formuler (j’ai déjà mangé). On dira qu’ils sont transitifs sans obligation.

Les verbes de « don » et de « dire » mettent en scène trois acteurs parce que tout simplement on dit quelque chose à quelqu’un, et que l’on offre un présent à un ami. On les nomme trivalents.

On voit donc bien que c’est le sens du verbe qui induit les fonctions qui lui sont rattachées. C’est le type d’action qu’il évoque qui induit fortement les différents acteurs et leurs rôles. Ce lien entre grammaire et sens est clairement mis en évidence par le fait que la présence ou l’absence de certaines fonctions changent le sens du verbe et vice et versa. Ainsi : « je descends tout de suite » et « je descends ma valise » ; « passe me voir » et « passe ton bac » ; « Vous allez manquer votre train » et « vous allez nous manquer ».

Pour accepter le COD, ou au contraire s’en passer, les différents verbes voient leurs sens se transformer.


  • Les différents compléments du verbe

- Complément d’objet direct :

Le COD indique quel est l’être ou l’objet sur lequel porte l’action exprimée par le verbe et exercée par le sujet. Ainsi, « la chèvre mange le chou ».

Comme son nom l’indique, le COD n’est pas relié au verbe par une préposition comme « à » ou « de » ; c’est sa position après le verbe qui indique sa fonction. Le COD n’est pas déplaçable. Si on le permute avec le sujet on modifie le sens de la phrase. Les verbes qui acceptent un COD sont dits « transitifs ».

- Complément d’objet indirect (COI):

Comme son nom l’indique, le complément d’objet indirect est, lui, relié au verbe par une préposition.

Ainsi, « parler de sa vie », « succéderà son père », « penser à son fils », « se souvenir de ses vacances », « manquer à quelqu’un », « manquer de quelque chose ». Les pronoms peuvent être COI. Ainsi « je pense à lui (à Pierre) » et « j’y pense (à mon rendez-vous)».

Complément d’attribution :

Après notamment les verbes « de don » ou « de dire », le complément d’attribution indique en faveur de qui ou au détriment de qui un acte est accompli. Ainsi, « donner un gage de bonne foi à l’ennemi » ou « infliger à l’ennemi une cruelle punition ».

Le complément d’attribution cohabite avec un complément d’objet direct. Seuls certains verbes le permettent parce qu’ils évoquent à la fois l’objet d’un échange et le destinataire. On les appelle des verbes trivalents : trois valences (Sujet, COD et Complément d’attribution).


  • Les compléments circonstanciels

Quel que soit le sens du verbe, il est compatible avec l’expression des circonstances. Ceci montre bien que les circonstances constituent le décor dans lequel on place un évènement ou plus rarement l’attribution d’une qualité particulière. Quel que soit le sens du verbe, on pourra donc choisir de situer l’action et les participants dans un cadre temporel ou spatial de son choix ou au contraire de ne pas spécifier ce cadre. Les circonstances actualisent la phrase toute entière c’est pourquoi on appelle souvent les compléments circonstanciels de temps et de lieu « complément de phrase » et non « compléments de verbe ».

Ainsi :

Dans « je marchais avec mes parents dans la cour », « dans la cour » est complément circonstanciel de lieu. Il donne un cadre spatial à l’ensemble d’un évènement auquel participent le locuteur et ses parents. Cette précision n’est en rien exigée par le verbe « marcher » ; c’est le libre choix de celui qui parle que de préciser ou pas le lieu de l’expérience évoquée. Il s’agit d’un complément de phrase.

Si l’on peut décider d’utiliser ou pas un complément circonstanciel, il ne faudrait surtout pas croire qu’ils seraient pour autant peu utiles à la communication.

Un exemple simple montre bien qu’il n’en est rien :

« Le plombier est venu sans ses outils ». « sans ses outils » n’est en rien exigé par le verbe « venir ». La phrase est tout à fait correcte sans son apparition : « le plombier est venu ». Cependant l’information donnée par « sans ses outils » est cruciale » ; elle seule peut expliquer pourquoi la fuite d’eau n’est pas encore réparée et l’appartement inondé.

Comme son nom l’indique, un complément circonstanciel indique les circonstances ou les modalités dans lesquelles se déroule une action ou un évènement.

Le temps : « il arrivera vers 16h »

Le lieu : « il marchait dans la forêt »

La manière : « il mange avec délicatesse »

La cause : « il tremble de peur »

Le but : « il court pour maigrir »

Le moyen : « il mange avec des baguettes »

Les compléments circonstanciels peuvent être reliés au verbe par une préposition qui indique leur fonction (« aller vers la lumière ») ou ne pas en avoir besoin (« le matin, je me lève tôt »), («marcher doucement »). Leur position dans la phrase n’indique en rien leur fonction.


  • Les compléments du nom

Pourquoi compléter le nom ?

Les noms ne sont pas rattachés à des objets ou à des êtres particuliers ; ils définissent des catégories qui s’opposent les unes aux autres. Ainsi si l’on choisit dans le paradigme des choix lexicaux le nom « pomme », il exclue absolument de se représenter un renard ou une banane, mais dans l’ensemble des pommes, si aucune précision n’est donnée, on peut se représenter n’importe quelle type de pomme, de n’importe quelle couleur ou forme, et même celles dans lesquelles on tombe en pâmoison.

En bref, un nom renvoie à une entité « abstraite » que l’auditeur va pouvoir actualiser, incarner à sa guise. Mais –et c’est là tout l’art de la communication- le locuteur a son mot à dire : il va pouvoir compléter le nom, c'est-à-dire lui imposer des déterminants qui seront autant de directives qui préciseront l’image que dessine dans son esprit l’auditeur. Ainsi je choisirais d’accompagner « pomme » de « verte » ou de « cuite », ou bien encore de « d’amour », « de terre » ou enfin de « qui embaume ». Certes, la représentation de notre auditeur sera toujours singulière, différente de notre expérience personnelle, mais les compléments du nom permettent de guider la compréhension au mieux de nos intentions de communication.

Voyons comment la grammaire complète les noms :

-« J’aime les garçons aux yeux bleus ? »

-« J’aime les garçons intelligents »

-« J’aime les garçons qui savent danser? »

Les trois exemples ci-dessus utilisent chacun trois modes de détermination du nom que nous allons analyser.

- Le nom complément du nom

Il arrive que le « nom complément du nom » soit construit directement sans préposition (« l’affaire Dreyfus »). Le plus souvent, il est relié au nom qu’il détermine par une préposition et lui apporte ainsi des informations particulières :

- Le possesseur : « la maison des voisins »

- La matière : « une bague en argent »

- La qualité : « un homme de génie »

- Le temps : « les fêtes de Pâques »

- Le lieu : « la bataille de Marignan »

- L’origine : « un vin de Bordeaux »

- La manière : « un achat à crédit »

- Le but : « un ticket de sortie »

- La cause : « un cri de douleur »

- La fonction : « une cuillère à soupe »

La fonction de complément du nom peut être occupée par d’autres mots que des noms : un pronom (le don de soi) ; un adverbe (les gens d’ici) ; un infinitif (une machine à coudre)

- L’adjectif qualificatif : épithète du nom

L’adjectif épithète est directement lié au nom. Il fait partie du groupe nominal. Il se distingue ainsi de l’adjectif attribut qui est nécessairement accompagné d’un auxiliaire (être, sembler, devenir…) et qui constitue avec le sujet une phrase complète et cohérente.

On doit aussi soigneusement le distinguer de l’adjectif mis en apposition. Comparons :

-« Les enfants fatigués furent autorisés à se reposer ». L’adjectif épithète « fatigués » divise les enfants en deux groupes : ceux qui étaient fatigués et qui s’arrêtèrent et ceux qui ne l’étaient pas et qui poursuivirent le chemin.

-«les enfants, fatigués, s’arrêtèrent » ou « fatigués, les enfants s’arrêtèrent ». La fonction d’apposition de l’adjectif « fatigués » implique que tous les enfants étaient fatigués et donc que tous s’arrêtèrent.

On notera la présence de virgules qui détachent l’apposition à l’écrit et de pause du même effet à l’oral.

- La proposition relative complète le nom

Le nom peut enfin être complété par une proposition relative. La proposition relative complète un nom avec deux effets de sens différents :

-« Les élèves qui étaient en échec sont restés en rattrapage ».

La relative « qui étaient en échec » divise les enfants en deux groupes ceux dont les difficultés nécessitaient un rattrapage et les autres qui y ont échappé. On appellera cette relative : déterminative.

-« Les loups, qui avaient faim, sortirent du bois ».

Tous les loups avaient faim. Dans ce cas, la relative, soigneusement séparée du reste de la phrase par deux virgules, informe sur la cause de l’évènement exprimé par ailleurs. On l’appelle « relative explicative » ; elle se rapproche d’ailleurs de l’apposition.

- Le nom noyau et ses compléments forment le groupe nominal

On appelle « groupe nominal l’ensemble composé du nom noyau et des éléments qui le déterminent.

Examinons la phrase : « Après de longues hésitations, l’homme aux cheveux blancs poussa la porte de bois d’un immeuble qui tombait en ruine »

Trois groupes nominaux :

-« après de longues hésitations » dont le nom « hésitations » constitue le noyau et « longues » l’épithète qui le détermine.

-« L’homme aux cheveux blancs » dont le noyau « homme »est déterminé par « cheveux blancs »

-« la vielle porte de bois d’un immeuble qui tombait en ruine est un groupe plus complexe dans lequel le nom noyau « la porte » a trois compléments : l’épithète « vieille », le nom « bois » et le nom « immeuble », lui-même déterminé par une proposition relative.

On voit bien qu’au sein du groupe nominal, il y a plusieurs niveaux de détermination : le nom noyau peut être déterminé par un autre nom (je découvris une maison de pierres), ce nom peut lui-même recevoir la précision d’un épithète (une maison de pierres blanches) et d’une relative (une maison de pierres blanches qui scintillait au soleil ).

Ces déterminations successives ne doivent pas altérer la cohérence du groupe nominal. Tout le groupe a une seule et même fonction qui lui est conférée par le noyau du groupe « maison ». Enfin on doit permettre à l’auditeur de savoir qui détermine qui sans ambigüité. Et savoir pour cela limiter la chaîne de la détermination sous peine de voir le groupe nominal se désagréger ; l’auditeur perdant le fil des déterminations successives.

Comprendre c’est donc organiser les éléments de chaque groupe autour de leur noyau nominal qui définit la fonction du groupe tout entier. Il faut en même temps reconnaître les différents degrés de détermination qui l’organisent le groupe fonctionnel. Une fois assurée la cohérence de chaque groupe nominal, il faut rattacher chacun de ces groupes à l’opérateur verbal selon la fonction qui lui est propre.

  • Pourquoi accorde-t-on les mots dans la phrase ?

Nous avons vu que la mission essentielle de la grammaire était de mettre ensemble des mots soumis par la nature même du langage à une succession inéluctable. Mais pour que cette construction soit réussie, il faut encore que l’on sache associer justement le nom sujet au verbe auquel il se rapporte et l’adjectif au nom qu’il détermine.

En bref si l’on veut que le sens construit corresponde à l’intention du locuteur, il faut que son auditeur sache quel mot « va » avec quel mot.

A titre d’illustration, examinons l’exemple suivant :

Je découvris une maison de pierres blanches qui scintillaient au soleil

Je découvris une maison de pierres blanches qui scintillait au soleil

La question est : « qu’est ce qui scintillait ? ». Dans la première phrase l’accord pluriel du verbe marque immédiatement la relation avec le sujet de la phrase « pierres blanches ». Dans la seconde, la marque de singulier désigne sans ambigüité la relation avec « maison ».

Considérons à présent les trois phrases suivantes :

« L’homme portait un pantalon et une chemise blanche » / « L’homme portait un pantalon et une chemise blancs »/ « L’homme portait une chemise et un pantalon blanc ».

Si, pour chacune des trois phrases, nous tentons de répondre à la question : « Qu’est ce qui est blanc ? » nous voyons que la reconnaissance de relations dépend largement des accords de genre et de nombre qui relient l’adjectif à l’un des deux noms ou aux deux à la fois.

La chaîne des accords sert donc à relier l’adjectif au nom qu’il qualifie de même qu’il permet de souligner la relation entre sujet et verbe dans « les hommes prévoient, dieu rit »

Cette chaîne des accords permet souvent de lever l’ambigüité lorsque l’on doit identifier le nom qu’un pronom représente. Ainsi :

« Regarde ce type et cette fille ! C’est celle qui m’a volé mon portefeuille/ C’est celui qui m’a agressé/ c’est ceux qui m’ont suivi. ».

Et pour finir, régalez-vous avec cet exemple qui montre la pertinence de l’accord masculin ou féminin qui permet de distinguer une déclaration d’amour posthume d’un mauvais sort.

"LA MORT DE L’HOMME QUE J’AI TOUJOURS DESIRE(E)"


  • Genre et nombre

Un nom peut être masculin ou féminin (genre) ; on peut choisir de le mettre au singulier ou au pluriel (nombre). Le genre et le nombre du nom déterminent les marques des accords qu’il impose au verbe, à l’attribut, à l’épithète ou à son déterminant. Genre et nombre sont deux mécanismes grammaticaux de natures très différentes.

Le français possède deux genres, l’un est dit masculin, l’autre est dit féminin. Il s’agit bien de genre grammatical et non pas de référence au sexe de l’être ou… de l’objet représenté. En effet, pourquoi une girafe, un crocodile, une maison ou un immeuble… ? La distinction de genre signifie tout simplement que les noms sont en français distribués en deux ensembles, l’un qui exige par exemple l’article « la » ou « une » ; l’autre qui impose « le » ou « un ».

Le sens des noms ne permet pas, dans la plupart des cas, de prédire à quel ensemble ils appartiennent. Ainsi qui pourrait dire pourquoi « clé », « serrure » et « porte » sont de genre féminin alors que « porche », « verrou » et « arbre » sont de genre masculin : il est clair que leur distribution est totalement arbitraire, même s’il est vrai que les noms qui réfèrent à des êtres de sexe femelle appartiennent au genre féminin (une vache), tandis qu’inversement ceux qui renvoient à un être de sexe mâle sont de genre masculin (un cheval). Lorsque l’on parle on ne choisit pas le genre d’un nom ; on choisit un nom et ce choix impose automatiquement un type d’accord masculin ou féminin.

Le nombre, lui, contrairement au genre est un choix libre qui ne dépend pas (dans l’immense majorité des cas sauf « ténèbres » et quelques autres) du nom sélectionné. En bref, un nom quel que soit son sens peut être utilisé au singulier ou au pluriel et référer ainsi à une unicité ou à une pluralité. Ainsi « un lapin » (pas plus d’1) s’oppose à « des lapins » (1, 2, 3….).

Notez que certaines langues ont une marque pour 1 ; une autre pour 2 et une autre encore pour plus de deux. On appelle cela le régime duel.

Les marques d’accords parfois s’entendent (Les autres enfants) (les petites ombrelles), (ils arrivèrent). Parfois elles ne s’entendent pas, mais se voient (les jolies filles), (ils chantent).

  • Les ponts entre les propositions

Nous avons vu que la première mission de la grammaire consistait à rassembler des mots, et à leur attribuer des fonctions spécifiques afin de construire une réalité cohérente : Ainsi, dans la phrase « Les méchants lutins ont enfermé la princesse dans une caverne profonde, le roi et le prince sont venus la délivrer», deux ensembles syntaxiques, chacun regroupé autour d’un verbe (enfermer et venir), se succèdent dans la même phrase. Leur succession indique que les évènements évoqués respectivement par l’un puis par l’autre se produisent l’un après l’autre sur l’axe du temps.

Mais la grammaire ne se contente pas de construire des ensembles qui se succèderaient les uns aux autres. Elle permet aux utilisateurs du langage d’établir des relations logiques entre ce que l’on appelle des « propositions », c'est-à-dire un ensemble de mots grammaticalement liés à un verbe.

Raconter une histoire suppose qu’entre des évènements on puisse établir des liens d’antériorité ou de postériorité, que l’on puisse indiquer le but de certaines actions ou la cause de certains états. Expliquer, argumenter exige que l’on puisse avancer des hypothèses à propos des effets et des conséquences, que l’on maîtrise linguistiquement les outils de la déduction ou de l’induction.

En bref, afin d’articuler notre pensée, la grammaire non seulement rassemble les mots pour constituer des propositions mais construit entre ces propositions des ponts qui en soulignent les relations logiques.

Ces relations peuvent être induites par la seule juxtaposition des propositions, soit formellement marquées par un connecteur.

  • La logique par simple juxtaposition

« Les chiens aboient, la caravane passe »

Nous avons là deux propositions ; « les chiens aboient » et « la caravane passe ». Aucun connecteur ne relie ces deux ensembles; et cependant, on perçoit parfaitement qu’une relation particulière les met en relation. En l’occurrence, la phrase signifie que « bien que les chiens aboient, la caravane passe tout de même » ou que « les chiens peuvent toujours aboyer, cela n’empêche pas la caravane de passer ». Mais on pourrait aussi comprendre que « c’est parce que la caravane passe que les chiens aboient ». On voit bien que l’absence de connecteur (« bien que », « parce que »…) n’empêche pas la mise en place d’une relation logique, mais elle la rend moins précise.

Ainsi dans la phrase « il est arrivé et il est reparti tout de suite », la relation entre les deux propositions est délicate à définir. Si les deux pronoms « il » réfère au même personnage, on en déduira que la relation est simplement chronologique (il arrive puis il s’en va). Si par contre, chaque pronom renvoie à un personnage particulier, alors la relation est de l’ordre de la causalité ou de la conséquence (Il est reparti tout de suite parce que l’autre est arrivé).

  • Les modes de subordination

On distingue les propositions qui sont rattachées à un verbe de la proposition principale que l’on appelle les propositions « conjonctives» et les propositions qui sont rattachées à un nom de la proposition principale que l’on appelle « relatives ».

- Les propositions subordonnées conjonctives :

Les conjonctives peuvent être de deux types selon la fonction qu’elles occupent par rapport au verbe de la principale :

- Les « complétives », qui sont COD du verbe de la principale. Ainsi « Elle m’a annoncé qu’elle allait se marier ». La subordonnée complétive peut être remplacée par un groupe nominal : « elle m’a annoncé une grande nouvelle »

- Les « circonstancielles » qui sont les compléments circonstanciels du verbe de la principale. Ainsi, « Dés qu’il le vit, il s’enfuit ». La proposition subordonnée conjonctive « dés qu’il le vit » indique la circonstance de temps dans laquelle s’effectue la fuite. Les subordonnées circonstancielles marquent des relations très variées qui permettent d’évoquer une vaste palette de relations logiques entre des évènements : le but (« La providence a mis du poil au menton des hommes pour qu’on puisse les distinguer des femmes ») ; la conséquence (« Tant va la cruche à l’eau qu’à la fin elle se casse ») ; la cause (« Une chose n’est pas juste parce qu’elle est la loi. Mais elle doit être la loi parce qu’elle est juste ») ; la comparaison (« Comme on fait son lit on se couche ») ; la concession (« L’art de plaire est plus difficile, quoiqu’on en pense, que l’art de déplaire ») ; la condition (« Si ma tante avait été un homme, elle serait mon oncle »)

 

- Les propositions relatives

La proposition subordonnée relative permet de compléter un nom de la proposition principale. Ce nom est appelé son antécédent. La relative apporte des informations sur ce nom ou ce pronom tout comme pourrait le faire un adjectif épithète ou un nom complément du nom. La relative est donc un mode de détermination du nom. Ainsi :

« Nous avons vendu la maison » ; « Nous avons vendu la maison qui appartenait à mon père » ; « Nous avons vendu la maison paternelle » ; « Nous avons vendu la maison de mon père ».

Le pronom relatif qui relie la subordonnée à la principale change de forme selon la fonction qu’il occupe par rapport au verbe de la subordonnée. Examinons les relatives suivantes :

-« Je connais l’homme qui t’a salué » (qui est sujet)

-« Je connais l’homme que tu as salué » (que COD)

-« Je connais l’homme à qui tu as parlé » (COI)

-« Je connais l’homme dont le frère est mort » (Complément de nom)

-« Je connais l’endroit où tu es allé » (circonstance de lieu)

Les relatives peuvent être soient « déterminatives », c’est à dire apporter une caractéristique au nom. Ainsi, « j’ai vu un homme

qui portait un chapeau à plume

». Elles peuvent être « explicatives », souvent encadrée de deux virgules et indique la cause d’un évènement évoqué par la principale. Ainsi, « Le loup, qui avait faim, sortit du bois » (Parce qu’il avait faim, le loup sortit du bois).

Lorsque l’on parle, notre voix monte, descend ; parfois elle fait une pause plus ou moins longue, plus ou moins marquée. Ces variations peuvent être liées à un état psychologique particulier, colère, joie, exaspération ou peur qui peut effectivement altérer parfois le cours tranquille de notre parole. Cependant, ce qui est important en matière d’étude de la langue, ce qui doit toujours retenir prioritairement votre attention ce sont les faits grammaticaux porteurs de sens : ceux qui ont une forme suffisamment constante et une information suffisamment établie pour que leur identification par votre auditeur oriente la construction de sa représentation.

En matière de ponctuation-comme pour les autres questions de grammaire- nous nous attacherons donc d’abord aux cas où elle a un effet pertinent sur le sens de la phrase.

Par exemple, une phrase dont l’intonation est montante traduira, en l’absence de toute autre marque, une interrogation ou pour le moins un doute sérieux. Ainsi, « Tu viendras à mon anniversaire » peut être un ordre ou un souhait si la courbe est descendante sur la fin de la phrase. Cette même phrase devient une interrogation si les deux dernières syllabes restent « perchées ». L’écrit dans ce cas là avertit le lecteur par un point d’interrogation.

Dans un tout autre contexte, la ponctuation peut être décisive pour l’interprétation grammaticale et donc pour la compréhension. Comparons :

  • « Je voyais les églises de Fiesole » signifie que j’étais sur ma terrasse et que je distinguais au loin les églises du village de Fiesole. « Fiesole » est le complément du nom « églises ».
  • « Je voyais les églises, de Fiesole ». La rupture introduite ici par la virgule (une pause à l’oral) indique que je me trouvais à Fiesole et que depuis ce village, je distinguais des églises de Florence. « Fiesole » est un complément circonstanciel de lieu. Dans cet exemple, on pourrait d’ailleurs déplacer le groupe « de Fiesole » en tête de phrase pour empêcher tout risque d’ambiguïté.

Enfin, la distinction importante entre les fonctions d’attribut et d’épithète d’un adjectif ou celle tout aussi essentielle entre une relative déterminative et une relative explicative repose entièrement sur la présence ou l’absence de la virgule. Que l’on en juge :

  • « Les enfants qui avaient bu furent malades ». Ceux qui n’avaient pas bu ne le furent pas.
  • « Les enfants, qui avaient bu, furent malades. Tous le furent parce que tous avaient bu.
  • « Les hommes convaincus de trahison furent fusillés ». Seuls ceux dont on avait prouvé la trahison furent fusillés.
  • « Les hommes, convaincus de trahison, furent fusillés ». Tous le furent, tous étaient des traitres.

Dans tous ces exemples, on voit bien le caractère pertinent de la virgule : à elle seule, toutes choses égales par ailleurs, elle change le sens de la phrase.


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