Qu’est-ce qu’un Atelier de Compréhension de Problèmes ou ACP ?

A l’école primaire, l’enseignement des nombres et du calcul est historiquement fondé sur des « problèmes arithmétiques», activités de raisonnement dont les données sont numériques. De même que les difficultés des élèves à résoudre ces problèmes sont attestées depuis longtemps et de façon récurrente, il est reconnu que l’identification des relations entre les informations numériques que délivre l’énoncé constitue une clé de réussite. La reconnaissance de ces relations serait favorisée par l’élaboration de représentations de la situation en se référant à des modèles mentaux (Vergnaud, Fayol), l’articulation de registres différents : un texte/un schéma/ un tableau/un dessin… (Duval, Flemming-Damm) ainsi que par l’explicitation, le récit (oral ou écrit) (Julo en particulier) [i].

C’est donc une activité complexe qui mobilise plusieurs dimensions : des capacités de compréhension des informations, des aptitudes à se représenter la situation et à mettre en relation ces informations, la maîtrise des procédures de calcul.

ROMA propose une démarche explicite d’investigation et de découverte des stratégies de résolution de problèmes au sein d’un dispositif d’Ateliers de Compréhension de Problèmes : les ACP. Ces ateliers fonctionnent avec un petit groupe d’élèves afin que tous et chacun puissent s’approprier, se représenter et modéliser ces situations avant de les résoudre. La démarche s’appuie sur les représentations des élèves en fonction du type de problème.

Trois types de problèmes sont plus particulièrement explorés dans les ACP :

Des problèmes de type I pour apprendre à :

  • Tirer des informations de différents supports : image, texte, schéma, tableau, graphique…
  • Traduire des informations d’un support à un autre
  • Organiser et traiter logiquement les informations

  Les problèmes de type I visent à travailler plus spécifiquement la prise d’informations dans les énoncés. Ceux-ci peuvent être donnés sous différentes formes : un texte, un tableau, un graphique, un schéma… Dans un même problème, plusieurs formes peuvent être présentes.

  Les ACP de type I permettent aux élèves de prendre conscience que :

  • Les informations ne sont pas toujours données par un énoncé sous forme de texte et peuvent être dispersées à plusieurs endroits d’un document.
  • La lecture et l’interprétation de ces informations données sur les différents supports aident à l’élaboration d’hypothèses sur le sens des énoncés. Le travail en groupe restreint favorise les possibilités d’exprimer précisément ces hypothèses, de les confronter et de les mettre en débat afin d’être comprises au plus près de leur signification.

  La démarche pédagogique utilisée dans les ACP de type I :

  Il s’agit principalement d’un travail de mise en relation entre les divers registres. Des énoncés sont présentés aux élèves sous différentes formes et leur tâche consiste à identifier ceux qui sont identiques. Par exemple, parmi plusieurs problèmes écrits en langage courant, les élèves doivent retrouver pour chacun d’entre eux, un tableau qui les représente. De même, ils peuvent avoir à associer des textes et des graphiques, des textes et des schémas, des schémas et des calculs…

  Dans ce cas-là, la résolution des problèmes n’est qu’un objectif second.


Des problèmes de type II pour apprendre à :

  • Reconnaitre les différentes structures additives des problèmes arithmétiques
  • Reconnaitre les différentes structures multiplicatives des problèmes arithmétiques

Les problèmes de type II cherchent à développer des stratégies de résolution de problèmes par une modélisation logique basée sur la typologie de G. Vergnaud. Résoudre un problème c’est être capable d’identifier la classe de problèmes auquel il appartient. Bien souvent, l’enfant se réfère aux quatre classes des opérations arithmétiques les plus expertes qui donnent la solution. Il identifie donc quatre catégories de problèmes : ceux qu’on résout avec une addition, ceux qui se résolvent à l’aide d’une soustraction, ceux dont la solution est trouvée avec une multiplication ou ceux résolus par une division.

Cette classification n’est pas pertinente car elle ne correspond pas aux différentes structures conceptuelles c’est-à-dire aux différents types de relations entre les données. Par exemple, parmi les structures dites additives, certaines de ces relations sont semblables et renvoient soit à une addition soit à une soustraction, alors que d’autres diffèrent tout en étant traduites mathématiquement par la même opération mathématique.

Ainsi, deux situations d’accroissement peuvent se résoudre à l’aide d’une addition si on cherche l’état final ou par une soustraction si on cherche l’état initial.

Structure arithmétique du problème

Problème

Relation entre les données

Solution

Accroissement 1

Au début d’une partie d’un jeu Maya possédait 4 jetons dans sa boite. Au cours de la partie elle en gagne 5.

Combien de jetons a-t-elle à la fin de la partie ?

 

 

Début

transformation

fin

4

5 en plus

?

 

4+5

Accroissement 2

Au début d’une partie d’un jeu Maya possédait des jetons. Au cours de la partie elle en gagne 5. A la fin de la partie elle a 9 jetons dans sa boite .

Combien de jetons avait-t-elle au début de la partie ?

 

Début

transformation

fin

?

5 en plus

9

 

9-5

 

Par contre, une situation d’accroissement ou une situation de comparaison ou encore une situation de réunion de deux parties diffèrent par les liens sémantiques qui existent entre les données mais se traduisent toutes mathématiquement par une addition.

 

Structure arithmétique du problème

Problème

Relation entre les données

Solution

Un accroissement

Au début d’une partie d’un jeu Maya possédait 4 jetons dans sa boite. Au cours de la partie elle en gagne 5.

Combien de jetons a-t-elle à la fin de la partie ?

Début

transformation

fin

4

5 en plus

?

4+5

Une comparaison

Lola a 4 ans. Son frère a 5 ans de plus que Lola .

Quel âge a son frère ?

 

 

Age Lola

4 

 



5 en plus

 

 

Age frère

? 

 

4+5

Une réunion de deux parties

Nora possède 4 billes bleues et 5 billes rouges.

Combien Nora possède-t-elle de billes en tout ?

 

 

 

Nbre billes B

4



? en tout

 

Nbre billes R

5 

 

4+5

 

De même au sein des structures dites multiplicatives, des situations de proportionnalité simples peuvent se résoudre soit par une multiplication soit par une division. 

 

Structure arithmétique du problème

Problème

Relation entre les données

Solution

Proportionnalité 1

Dans une classe, on répartit les élèves en 4 équipes de 6 élèves.

Combien y a-t-il d’élèves dans la classe ?

 

 

 

Recherche du produit total

Nbre équipes

Nbre élèves

1

6

4

?

 

6 x 4

Proportionnalité 2

Dans une classe de 24 élèves, on répartit les élèves en équipes de 6 élèves.

Combien obtient-on d’équipes ?

 

recherche du nombre de parts

 

Nbre équipes

Nbre élèves

1

6

?

24

 

24 : 6

Division quotition

Proportionnalité 3

Dans une classe de 24 élèves, on répartit les élèves en 4 équipes.

Combien y a-t-il d’élèves par équipe ?

 

 

recherche de la valeur d’une part

 

Nbre équipes

Nbre élèves

1

?

4

24

 

24 : 4

Division partition

 

Tandis que des situations qui mettent en relation les données de façon différente, par exemple des comparaisons et des proportionnalités simples, se traduisent par une même multiplication.

 

Structure arithmétique du problème

Problème

Relation entre les données

Solution

Une comparaison

Dans une classe, il y a 4 garçons. Il y a 6 fois plus de filles que de garçons.

Combien y a-t-il de filles ?

 

 

 

 

Relation ternaire

garçons

4 



6 fois plus

 

filles

?

6 x 4

Une proportionnalité

Dans une classe, on répartit les élèves en 4 équipes de 6 élèves.

Combien y a-t-il d’élèves dans la classe ?

 

 

 

 

Relation quaternaire

Nbre équipes

Nbre élèves

1

6

4

?

 

6 x 4

 

 Les différentes structures additives étudiées dans les ACP :

  • Les situations de transformations positives (accroissements) et négatives (diminutions) : on recherche soit le nombre final, soit le nombre de la transformation, soit le nombre initial.
  • Les situations de réunions de deux parties en un tout avec la recherche soit du tout d’une partie
  • Les situations de comparaisons additives positives (de plus) ou négatives (de moins) : on recherche soit l’une des deux quantités comparées, soit l’écart entre les deux.
  • Les situations de compositions de transformations : par exemple, deux transformations qui se suivent, toutes deux positives ou toutes deux négatives, ou une positive et une négative.

Les différentes structures multiplicatives étudiées dans les ACP

  • Les situations de comparaisons multiplicatives positives (fois plus) et négatives (fois moins) : on recherche soit l’une des deux quantités comparées, soit le rapport entre les deux.
  • Les situations de proportionnalité simple : soit on recherche le produit total, soit le nombre de parts, soit la valeur d’une part, soit encore le rapport de proportionnalité, en s’appuyant sur la valeur unitaire ou non.

Ces différentes structures sont étudiées dans les ACP de ROMA selon une progression rigoureuse proposée depuis le CP jusqu’à la fin du cycle 3.

La démarche pédagogique utilisée dans les ACP de type II :

  • De façon progressive au cours d’une année ou sur les cycles 2 et 3, un premier travail s’articulera autour de l’identification des structures pour favoriser la généralisation des relations entre les informations d’un problème. C’est ainsi que les élèves sont régulièrement confrontés à un ensemble de 6 à 8 énoncés de problèmes : la tâche demandée est de se centrer sur la structure elle-même des problèmes pour effectuer un classement de ces problèmes au niveau des signifiés sans prendre en compte des classements liés aux signifiants ou aux opérations mathématiques.
  • Puis, au sein de chaque structure, un travail de modélisation et de schématisation permettra de mobiliser des procédures de résolution adaptées.
  • Enfin, dans tous les ACP, un soin particulier est pris pour favoriser l’explicitation des stratégies de résolution. L’élève doit être amené à justifier ses choix, à expliciter sa démarche. Cette démarche vise à apprendre, petit à petit, à formaliser des raisonnements de plus en plus complexes.

Elaborer des similitudes entre les différents problèmes permet aux élèves d’accéder au modèle mathématique sous-jacent. La généralisation de ces modèles sous forme de catégories de problèmes de référence favorise alors le transfert par analogie de chaque structure reconnue à des problèmes nouveaux ainsi que les stratégies de résolution liées à chacune.


Des problèmes de type III pour apprendre à :

  • Gérer simultanément la prise d’informations et leur traitement dans des tâches complexes
  • Organiser un raisonnement à plusieurs étapes

Les problèmes de type III

Le travail effectué dans les ACP de type I autour de la prise des informations et celui effectué dans les ACP de type II autour de la mise en relation sémantique des informations, se trouvent réinvestis et finalisés dans les tâches de résolution des situations de type III. Les problèmes de type III visent à la fois à savoir extraire et trier les informations de différents supports et à savoir les traiter en utilisant les modèles élaborés dans la reconnaissance des différentes structures de problèmes arithmétiques. Dans ROMA, une attention particulière est portée à relier les mathématiques à la vie « réelle » en proposant des situations ancrées dans la vie quotidienne ou en rapport avec les autres disciplines scolaires.

D’un point de vue pédagogique, ce type d’activité s’apparente à une tâche complexe, c’est-à-dire une tâche dont la résolution amène l’élève à utiliser, en les articulant, des ressources internes (culture, capacités, connaissances, etc.) et externes (documents, aides méthodologiques, protocoles, notices, etc. ).

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