L’école debout pour l’égalité des chances

Depuis des dizaines d’années, notre langue commune et notre intelligence collective sont mises à mal jour après jour. Sommes-nous, pour autant, victimes d’un complot ourdi par des forces obscures décidées à saper les fondements de notre culture et de notre Langue ? Non, rien de tout cela ! Nous tous, collectivement, avons parfois oublié notre premier devoir : transmettre à nos enfants l’amour du raisonnement rigoureux et de la réfutation exigeante, l’audace d’une imagination ardente et le goût d’une langue juste et précise.

Environ 15% des élèves empruntent le chemin de l’échec scolaire dès le CP, avec un vocabulaire insuffisant et des difficultés de compréhension de textes. Au collège, ils peinent à devenir des lecteurs autonomes capables de lire avec autant d’efficacité et de plaisir un conte merveilleux, un énoncé de mathématique ou un texte scientifique.

Faute de posséder les mots justes, faute de savoir les organiser, faute enfin de pouvoir articuler une argumentation logique, ils se nourrissent de ce qui relève parfois de l’amalgame et de l’illogisme. Ils deviennent plus vulnérables face à des discours sectaires et radicaux véhiculés sur certains réseaux sociaux qui prétendent leur apporter des réponses simples, immédiates et définitives.

Nous risquons de perdre la bataille de l’égalité des chances si nous ne donnons pas à l’École les moyens d’instaurer une différenciation pédagogique généralisée qui permettra à chaque élève d’être accompagné au plus juste de ses propres difficultés. La réponse à l’échec programmé de certains élèves ne saurait être l’instauration systématique de groupes de niveaux qui nous conduirait à un enseignement à deux vitesses.

Il faut, à chacun des différents paliers si difficiles à franchir par les élèves les plus fragiles de l’école maternelle, instaurer un système liant une évaluation diagnostique à des ateliers de compréhension des textes de toutes les disciplines. En bref, nous devons placer la pédagogie de la compréhension au cœur des enseignements fondamentaux.

L’heure est venue de faire le choix d’une école empreinte de résilience et de justice, qui combatte la reproduction sociale, car le sentiment profond de ne pas pouvoir enrayer l’échec scolaire décourage les futurs talents aspirant à exercer le plus beau métier du monde et à rejoindre les rangs de ceux qui jadis, furent les hussards de la République.

Alain Bentolila                       

Cette année, les Controverses auront lieu :