Je pense donc tu es

Théo et son copain discutent en sortant de l’école.

« Dis donc, tu as vu la nouvelle remplaçante ?

Je te suis, mon Théo ! C’est pas faux.

Oui, Théo, je l’ai vue, elle est gentille !…

Elle est gentille ? … tu plaisantes ! Avant que notre maitresse parte en stage, c’était autre chose !

Ben oui, c’était différent ! C’est bien normal, Théo. Et c’est intéressant de rencontrer de nouvelles personnes, des gens différents, c’est mon père qui me l’a dit.

OK, rencontrer des gens différents, c’est chouette ! On apprend d’autres choses. Mais moi, je veux savoir quoi ! Regarde, par exemple, quand on est en lecture, tu te souviens comment faisait notre maitresse ?

Oui, bien sûr, elle parlait d’ateliers de compréhension et on travaillait en petits groupes, chacun pouvait parler, on disait ce qu’on pensait et on n’était pas toujours d’accord entre nous ; alors, on se mettait d’accord grâce au texte et la maitresse nous accompagnait pour ne pas que l’on se tape sur la figure. C’était comme ça, tu es bien d’accord, Théo ?

Exactement ! … ça, c’était avant ! Et ça nous plaisait bien, non ? On réfléchissait ensemble et on apprenait vraiment, tranquillement à comprendre ce qu’on lisait. Mais maintenant, avec la remplaçante, est-ce qu’on a envie de parler, est-ce qu’on peut parler ? Elle dit tout le temps « Écoutez-moi ! » mais elle, est-ce qu’elle nous écoute ?

Bon… pas vraiment, puisqu’elle nous dit « Je vais vous dire ce qu’il faut retenir, ça ira plus vite ! » Parfois, j’ai l’impression qu’elle nous prend pour des idiots, qu’elle nous regarde comme si on n’était pas capables de réfléchir. Finalement, Théo, je comprends mieux ce que tu voulais dire.

Oui, elle nous dit à sa manière « Je pense donc tu es », alors que moi, je préfèrerais qu’elle nous dise « Tu penses donc je suis ».

Paul Benaych

26 /10/2024